ANTICIPATIONROMAN

DEMAIN LES BARBARES (FRANCK POUPART)

Le résumé du livre

À la fin du premier quart du XXIᵉ siècle, la France, qui doit assumer une dette s’élevant à 400% de son PIB, se retrouve contrainte par le FMI d’appliquer un plan de rigueur drastique appelé « Lois temporaires de sauvegarde nationale ». Ce plan comporte des licenciements massifs dans la fonction publique, une hausse drastique de la fiscalité, une suppression de toutes les aides sociales, une privatisation de l’assurance maladie et un gel des salaires et des retraites. Les riches se réfugient dans des zones sécurisées comme l’hypercentre de la capitale alors que les pauvres sont abandonnés à leur triste sort dans les périphéries. Et quand l’Etat ne fut plus en mesure de verser les salaires des policiers ni les soldes des militaires, ce fut l’explosion. Des zones entières déjà sous influence islamique firent sécession. Des milices para-militaires se créèrent pour tenter de récupérer ces territoires perdus de la République. Et en 2028, l’Union Européenne n’existe plus. Deux flics, Alex et Lucas patrouillent encore un peu dans les rues de Paris. Juste devant eux une voiture piégée explose. En même temps, une brasserie est mitraillée rue de Lappe, une école juive est prise pour cible. Une trentaine d’enfants y trouvent la mort. Et un fou d’Allah kamikaze déclenche sa ceinture d’explosifs devant le musée d’Orsay. Ainsi débute une guerre civile ethnique dont personne ne peut imaginer la fin…

Ma critique

« Demain les barbares » est un roman d’anticipation dystopique dans lequel l’auteur a basé toute son intrigue sur les conséquences prévisibles de réalités qui existent déjà. Il a continué de tracer les lignes de force d’une tendance et poussé à l’extrême la logique tout ce que nous vivons ou avons déjà vécu (Charlie-Hebdo, Bataclan, Stade de France, égorgements de prêtres ou de profs, attentat de Nice, etc.) Les tueries, les viols, les tortures, les actes de barbarie en tous genres (émasculations) se succèdent dans cette histoire qui fait froid dans le dos. Toutes ces horreurs, que l’on déconseillera aux âmes sensibles et à tous ceux qui vivent dans le déni de réalité, alternent avec de nombreuses scènes de sexe particulièrement torrides. Les personnages sont assez stéréotypés, tel ce président de la république déchu portant le nom de « François », pleutre, incapable et trouillard qui semble la simple démarque d’un certain autre. Le style de l’auteur est assez vivant malgré quelques approximations langagières et une tendance à abuser des pronoms personnels, ce qui oblige le lecteur à deviner de qui l’on parle et parfois d’y arriver à grand peine. Si les katibas islamistes sont décrites de manière assez réaliste et vraisemblable (simple reprise de l’actualité), leur pendant « Rempart » avec leur leader charismatique Cyrus Rochebin, sorte de cocktail 2/3 Soral, 1/3 Zemmour, relève de la fiction la plus totale. Ce mouvement est aussi caricatural qu’improbable, même s’il s’appelle « Renaissance et Partage » (cf « Egalité et Réconciliation »). En lisant cet opus, on peut même se dire que le futur sera sans doute pire que ce que l’auteur nous raconte. Pour qu’il y ait guerre civile, il faut deux factions en présence, sinon il s’agit plutôt d’une épuration ethnique, d’un génocide. Et l’histoire du monde est déjà pleine d’invasions, de tueries et d’appropriations indues de territoires. Et ça peut ne pas arriver qu’aux autres. Glaçant, mais donnant à réfléchir sur notre destin.

Ma note

3,5/5

ANTICIPATIONSCIENCE-FICTION

LA NUIT DES TEMPS (RENÉ BARJAVEL)

Le résumé du livre

Dans la base française du pôle sud, plusieurs savants procèdent à des sondages en profondeur. Ils font des constatations assez étranges entre 900 et 1000 mètres sous la glace. Ils enregistrent même un signal sonore qui fonctionnerait depuis la bagatelle de 900 000 ans. Ils rentrent à Paris pour faire connaître leur découverte. Bientôt tous les journaux du pays titrent : « La plus grande découverte de tous les temps ! », « Une civilisation congelée » ou « L’UNESCO va faire fondre le pôle sud. » Peu après, une énorme mission internationale se met à creuser un puits dans la glace à l’endroit concerné. À plus de 900 mètres de profondeurs, les mineurs découvrent un premier oiseau pris dans la glace et tout au fond du puits, toutes sortes de ruines et divers animaux pétrifiés. Mais dès qu’arrive un peu de chaleur, tout se met à fondre et à disparaître. Mais comme le signal continue à émettre, ils continuent à creuser toujours plus profond. Ils finissent par atteindre une roche extrêmement compacte, puis une masse de sable et enfin une grosse plaque en or massif. Ils finissent par dégager une sphère de 27 mètres de diamètre soit la hauteur d’un immeuble de dix étages à l’intérieur de laquelle ils feront une découverte stupéfiante…

Ma critique

« La nuit des temps » est un des meilleurs romans de science-fiction de René Barjavel. En se référant aux histoires légendaires de l’Atlantide, du continent de Mu et autres, il nous entraine à la découverte de Gondawa, une brillante civilisation qui aurait fini par disparaître dans les profondeurs de la terre sans laisser de traces suite à un conflit titanesque avec leurs ennemis. Bien évidemment, cette intrigue fort bien menée, relève de la parabole ou du conte philosophique. L’auteur veut nous faire partager son horreur de la guerre et les risques de fin de notre propre civilisation en cas de conflit nucléaire généralisé. Ce ne serait pas la première fois que l’humanité aurait accumulé tant d’armes qu’elle aurait été en mesure d’éradiquer toute vie sur terre. Mais nos prédécesseurs en folie destructrice auraient placé dans un œuf d’or deux « germes » cryogénisés capables de faire refleurir la vie une fois la tourmente apaisée. Mais ils n’avaient pas anticipé le basculement de l’axe terrestre et la congélation du pôle sud. Publié en 1968, cet ouvrage majeur de la SF, est malheureusement encore d’actualité aujourd’hui. Le lecteur ne peut qu’approuver tout ce que Barjavel avance sur la nécessité du pacifisme, avec un petit bémol quand même sur l’espoir que le salut ne puisse venir que de la jeunesse…

Ma note

4,5/5

ANTICIPATION

LE GRAND SECRET (RENÉ BARJAVEL)

Le résumé du livre

Le 16 janvier 1955, le pandit Nehru reçoit un appel téléphonique inquiétant de son ami Shri Bahenba, à la fois sage respecté et scientifique de grand renom. Il lui demande de venir le rejoindre immédiatement à Bombay, dans son laboratoire, pour l’entretenir d’une affaire de la plus haute importance. Le sort de l’humanité en dépendrait. Toutes affaires cessantes, le chef de l’État indien saute dans son avion, rejoint son ami et reste plus de cinq heures à discuter avec lui. Pour être de quelque efficacité, les révélations du savant ainsi que ses propositions doivent rester ultra-secrètes… Pendant ce temps, à Paris, Jeanne, autre scientifique, trompe son mari cardiologue avec Roland, lui aussi issu du milieu de la recherche biologique… De son côté, Nehru part, de capitale en capitale, rencontrer tous les grands de ce monde (Eisenhower, Kroutchev, Mao, Coty…) pour les mettre dans la confidence, alors que tout le monde croit qu’il œuvre pour la fin de la guerre froide et pour la paix dans le monde. Tous les services secrets sont sur les dents. On apprend très vite que le laboratoire de Bahenba a été incendié et que celui de Roland a suivi. Les deux savants auraient trouvé la mort dans les flammes. Mais Jeanne, qui refuse d’y croire, part à la recherche de son amant…

Ma critique

« Le grand secret » est un roman d’anticipation tout à fait passionnant, sans doute un des meilleurs titres de René Barjavel. Le lecteur reste pendant tout le premier tiers du roman à se demander quel peut bien être ce grand secret qui agite à ce point tous les dirigeants du monde. Puis il découvre la solution en forme de compromis bizarre que ceux-ci mettent en place. Puis peu à peu, la belle construction un peu bancale se fissure et tout bascule dans un drame qu’on ne déflorera pas pour ne pas gâcher le plaisir du lecteur. Car plaisir il y a, et pas des moindres. Difficile de lâcher ce bouquin tant le suspens est grand et tant l’histoire est prenante. Bien que publié il y a déjà un demi-siècle, cet ouvrage n’a pas pris la moindre ride. Il ferait même un best-seller de nos jours. Barjavel s’y est montré incroyablement visionnaire. Son histoire, en forme de conte écologique, reste d’autant plus d’actualité que les problématiques se sont encore exacerbées de nos jours : surpopulation réelle ou fantasmée, planète aux ressources limitées, transhumanisme visant l’immortalité par le biais de l’IA et de l’humain augmenté et stérilisation imposée ou subie de la population pour que l’élite des surpuissants et des ultra-riches puissent mieux profiter entre eux de tous les biens gratuits que dispense Dame Nature. Excellent. À lire et à relire.

Ma note

4,5/5