LES FANATIQUES DE L’APOCALYPSE (NORMAN COHN)
Le résumé du livre
Du nord de la France jusqu’en Bohème en passant par les Pays-Bas et l’Allemagne, on vit se répandre de très nombreux mouvements millénaristes du XIe au XVIe siècle. Professeur au King’s College de l’Université de Durham à Newcastle, Norman Cohn, pour éviter sans doute de trop se disperser, a pris le parti de se cantonner à ce territoire particulier et à cette période précise, même si ces mouvements et ces idéologies ont existé à d’autres époques et ailleurs dans le monde. C’est dans l’Ancien Testament que ces acteurs ont puisé l’essentiel de leurs théories eschatologiques et révolutionnaires. Pour eux, l’univers est dominé par une puissance maléfique et tyrannique dont la capacité de nuisance et de destruction semble infinie. Elle est envisagée comme surhumaine et démoniaque. Elle inflige à l’humanité des souffrances perpétuelles (guerres, famines, grandes épidémies) jusqu’à ce que l’Eternel vienne mettre fin à son règne. Alors arrivera un âge d’or de paix, bonheur et prospérité pour au moins mille ans. Mais pour hâter ce retour du divin, l’homme doit se retrousser les manches et commencer lui-même le travail de nettoyage (liquidation du clergé, des riches, des nobles, des puissants, abolition des taxes et impôts et même mise en commun de tous les biens…)
Ma critique
« Les fanatiques de l’Apocalypse » est une étude historique assez fouillée des innombrables courants millénaristes et révolutionnaires qui secouèrent l’Europe du Nord à de très nombreuses reprises. L’ennui, c’est que qui trop embrasse mal étreint. Tous ces mouvements sont survolés presque trop vite tant il y en a (Montanus et le montanisme, Tanchelm, Eudes de l’Etoile, Tafur, Fulk de Neuilly, le Maître de Hongrie et la croisade des Pastoureaux, Joachim de Flore, Conrad Schmid et les Flagellants, Amaury de Bène et les communautés de l’Esprit Libre, Pierre Valdo et les Vaudois, Guillaume Cornelis, Marie de Valenciennes, Quintin, Jean Boullan, Jean Huss, Bohm, Joss Fritz, Muntzer, Jean de Leyde, pour ne citer que les principaux). Tout part en général d’un individu qui déclare avoir reçu une inspiration divine, être une sorte de nouveau Messie. Il réunit autour de sa personne des groupes de gens du petit peuple, des artisans, paysans et autres vagabonds ou miséreux. C’est toujours dans des périodes de misère, de famine ou d’épidémies comme la peste noire que cela se produit. Le meneur promet de faire arriver l’âge d’or en liquidant le clergé et les nantis, en abolissant l’argent et la propriété privée et en mettant tous les biens en commun et parfois même les femmes. Et quand le mouvement rencontre un certain succès, les révolutionnaires s’emparent de villes ou de régions entières. Les princes, les rois et les évêques finissent par réagir. Et tout s’achève dans un bain de sang. Le pseudo-messie finit brûlé. Bien qu’un peu indigeste à lire, cet ouvrage reste fort intéressant, car il montre un aspect assez peu étudié de l’histoire du Moyen-Âge et de la Renaissance et permet de mieux comprendre que tous ces mouvements furent les précurseurs de nos grandes et terribles idéologies modernes, le nazisme, le communisme et même le mondialisme, mélange paradoxal et détonnant des deux précédents. Tout trois promettant d’ailleurs le paradis sur terre par la grâce d’un état de nature égalitaire, sans argent, ni propriété privée. « Vous ne possèderez rien et vous serez heureux », dixit Klaus Schwab. Ouvrage à lire pour mieux comprendre les ressorts du fanatisme religieux ou idéologique, de l’obscurantisme et de l’esprit moutonnier et si facilement manipulable du petit peuple.
Ma note
4/5